J’ai eu le plaisir de participer à l’Université d’hiver de la formation professionnelle (UHFP) organisée par Centre Inffo, qui s’est déroulée à la fin du mois de janvier dernier à Biarritz. J’y ai présenté une conférence intitulée Ici et ailleurs : le panorama des innovations pédagogiques. Pendant cette université, il a beaucoup été question de la réforme de la formation professionnelle, de la nécessité d’individualiser les parcours sans augmenter les coûts, de toutes les démarches qui permettent de répondre au plus près de la demande (et éventuellement des besoins) du client, de la certification qui apparaît désormais comme un incontournable… Le dernier jour, nous nous sommes intéressés à ce qui se passe dans les salles de cours et derrière les écrans, là où se déroule, y compris en ligne, cette rencontre toujours un peu mystérieuse entre une formatrice / un formateur et des « apprenants », entre des vraies gens menant un projet commun, que l’on pourrait résumer par cette simple phrase : vous êtes là pour apprendre, et je vais faire tout mon possible pour vous faciliter la tâche.
Qui sait ce qui se passe dans les classes ?
Fondamentalement, l’innovation pédagogique ne sert qu’à cela : améliorer le processus d’apprentissage. Mais elle apparaît trop souvent comme une obligation dont la justification tient à bien autre chose : attirer plus de stagiaires, montrer que l’on est moderne, se conformer aux injonctions de la direction, ce ne sont que des exemples. En formation comme en beaucoup d’autres domaines, les dispositifs et les cadres d’action ont pris le pas sur l’action elle-même. Les ingénieurs de formation sont passés devant les ingénieurs pédagogiques et les formateurs. Et c’est fort dommage. Car ces derniers, comme tous les gens de métier, ceux qui travaillent au plus près de la réalité qu’il leur est demandé de transformer, ont à coeur de progresser, ce qui revient dans leur cas à faciliter la progression des autres. Tout formateur un peu expérimenté sait, en sortant de la salle ou de l’atelier, quand il a animé une bonne séance de formation. Il sait aussi quand ça n’a pas marché. Il suffit de le lui demander.
Les innovations pédagogiques du moment peuvent toutes être liées à deux phénomènes essentiels : le déplacement du centre de gravité de la formation sur l’apprenant (au détriment du formateur), d’une part. L’effacement des frontières entre l’espace de formation et le reste du monde, d’autre part. Contre cela, il ne sert à rien de lutter. Accompagner le mouvement, adopter l’attitude du roseau plutôt que celle du chêne : s’adapter n’est pas se trahir ni trahir son métier, c’est évoluer, chercher l’accord entre soi et les autres, dans un environnement qui nous transforme, tous.
Formation : deux changements majeurs
Le déplacement du centre de gravité de la formation sur l’apprenant a conduit à diversifier les supports de formation, pour s’adapter aux préférences des uns et des autres (puisqu’enfin on admet que l’écrit et le cours magistral ne conviennent qu’à certains). Et à prendre en compte les émotions, dans la mouvance du retour massif à l’intériorité constaté aujourd’hui. Surtout, il conduit progressivement à faire confiance aux apprenants eux-mêmes pour construire les savoirs, et je vous laisse découvrir dans le diaporama ce qu’est le social learning.
L’effacement des frontière desserre le cercle de fer des horaires et des lieux de formation. Il fluidifie la circulation entre apprentissages formels et informels. Il autorise à assimiler la théorie au calme, à son rythme, grâce aux médias et aux appareils mobiles, et à tirer le meilleur parti du temps passé ensemble. C’est la classe inversée, chère au coeur (et à l’esprit !) de Marcel Lebrun.
Le formateur expert
Rien de bien nouveau dans tout cela, me direz-vous. On en parlait déjà il y a 6 mois, ou même voici deux ans, c’est vieux ! Eh bien oui, et même encore plus vieux que cela… Mais plutôt que de laisser les formules s’user dans la novlangue éducative qui tournoie sur Internet, emparez-vous de ce que les mots désignent, essayez ces techniques et modalités de formation, non parce qu’on vous le demande, mais pour tenter d’améliorer ce dont vous n’êtes pas satisfaits, dans vos formations. Vous seuls pouvez le faire car les gens de métier, les spécialistes, c’est vous, et personne d’autre.
Retrouvez ici la conférence complète :
A voir aussi sur le site de Centre Inffo.