MOOC : cours du prof ou cours des gens ?

Rebecca Cruz, Flickr, licence CC : https://www.flickr.com/photos/canoeguru/6331751393
Rebecca Cruz, Flickr, licence CC : https://www.flickr.com/photos/canoeguru/6331751393

Un MOOC est un cours, avec tout ce que ce mot recouvre de conceptions différentes. Dans la plupart des MOOC, les informations sont diffusées top – down, du haut vers le bas, de l’orateur vers la masse des participants passifs, comme à la télévision, comme dans une conférence. Où est le mal, me direz-vous : si quelqu’un sait quelque chose, il a bien le droit de le partager avec tous ceux qui ont envie de le découvrir ! Certes. Pourquoi pas. Ceci dit, l’essentiel ne se passe pas là, mais autour.

Car cette colonne liquide (flux vidéo) de transmission d’information peut être conçue comme un canal exclusif (ou souhaité exclusif) et contrôlé tout au long de son axe, comme ça :

Gerben van Heijningen, Flickr, licence CC : https://www.flickr.com/photos/breenjones/8352977729
Gerben van Heijningen, Flickr, licence CC : https://www.flickr.com/photos/breenjones/8352977729

Ou bien, elle peut se ramifier en chemin, au point de couvrir un immense territoire, comme ça :

Feral Arts, Flickr, licence CC : https://www.flickr.com/photos/feralarts/5508196784
Feral Arts, Flickr, licence CC : https://www.flickr.com/photos/feralarts/5508196784

Vous vous en doutez, le social learning dont on parle tant et souvent à tort et à travers correspond à la deuxième image.

10, 20 fois plus d’informations créées par les participants que par les concepteurs

Le MOOC des gens, c’est celui dans lequel les informations transmises et les activités proposées stimulent l’apparition d’une multitude de commentaires, productions, débats, actions… qui constituent en finale la véritable matière du cours, bien plus que l’information initiale. La production des participants à un MOOC représente facilement 10, 20 ou 100 fois plus que ce qui a été déposé sur la plateforme par l’équipe conceptrice. Et ce n’est pas que du vent, loin de là. Je l’ai dit à plusieurs reprises, je suis toujours étonnée de la qualité des productions des mooqueurs, que l’on considère les éléments de cette production, dans lesquels on découvre de nombreuses pépites, ou qu’on la considère dans son ensemble, évidemment. Là, vous découvrez des débats d’une infinie richesse, à mille lieues des articles synthétiques et des courtes vidéos qui ont agi comme starters de cette construction commune. Si vous voulez apprendre, vraiment apprendre, plongez dans la piscine des activités, produisez et surtout, ne manquez pas de lire et regarder ce que vos pairs ont produit. J’avais tenté de donner un aperçu de la richesse des contributions au MOOC Impressionnisme dans ce diaporama :

[slideshare id=47968707&doc=bilan-mooqueurs-150510174938-lva1-app6891]

Ce n’est qu’un aperçu, car je ne disposais pas des outils de traitement des données qui m’auraient permis d’aller plus loin. Mais j’ai bon espoir d’être mieux outillée pour les prochains MOOC culturels produits par Orange et ses partenaires (RMN – Grand Palais, Château de Versailles), qui seront consacrés à Picasso et à la vie à la cour de Louis XIV à Versailles.

Passer de la foule des récepteurs à la foule des concepteurs

Cette création massive de savoir est bien sûr ce que nos amis canadiens Downes, Siemens et Cormier (j’aurai le plaisir de retrouver ce dernier à la conférence eMOOCs 2015 🙂 ) visaient avec leurs premiers MOOC (et les suivants aussi, dans une certaine mesure), et ce que nous ambitionnions aussi lorsque nous avons créé ITyPA en 2012. C’est ce qui a été vite poussé sous le tapis lorsque la grosse cavalerie américaine est arrivée, rapidement suivie de ses clones d’autres pays, avec les MOOC les plus rétros, en termes pédagogiques, que l’on puisse imaginer. Et c’est ce qui est aujourd’hui redécouvert par certaines universités et non des moindres. Sur le site de la Harvard Business Review, on lira un fort intéressant article dans lequel l’auteur soutient que l’apprentissage social peut se substituer au savoir expert. Dans le Huffington Post, un chercheur du MIT parle carrément de MOOC 4.0, dans lesquels l’activité générée par la foule constitue le carburant du changement auquel aspire les participants.

Dans les deux articles mentionnés, les auteurs donnent de précieuses indications sur les moyens pris pour stimuler une participation de qualité. Car elle ne vient pas « comme ça ». Elle s’appuie sur différents éléments :

– Une première information qui ne vise pas à l’exhaustivité mais stimule au contraire la recherche et la réflexion;

– Des activités sous forme d’études de cas, à réaliser en groupes;

– Des signes d’engagement de la part des participants qui souhaitent jouer le jeu;

– De forts moments collectifs, en présence et à distance, pour renforcer l’appartenance à la communauté;

– Une attention constante portée au méta-apprentissage : comment apprenez-vous, qu’est-ce qui vous freine, pourquoi adoptez-vous telle attitude, etc.

Tout cela est moins lié à la thématique du cours qu’à son ingénierie pédagogique; d’où l’importance cruciale d’associer les concepteurs pédagogiques dès les premières phases du projet, car c’est eux qui poseront la question essentielle : « Que souhaitez-vous que les participants fassent dans / avec ce MOOC ? » et proposeront différentes stratégies pour atteindre le but recherché.

De l’ingénierie pédagogique à l’intelligence sociale

Ce principe de co-création qui donne la part belle aux participants, à ceux qui s’emparent de ce que l’on a préparé pour eux et le font grandir, est au coeur de l’action que nous menons chez MOOC et Cie. La technique est au service de la pédagogie, et la pédagogie est au service de l’intelligence sociale, du faire ensemble ce qu’aucun de nous n’aurait pu faire seul, ni même ce dont aucun de nous n’aurait pu imaginer l’existence, tout simplement. Nous accompagnons des équipes de concepteurs dans cet esprit de co-conception, refusant de produire des « MOOC en série » pré-formatés et privilégiant le DIY. En cela, nous sommes passés dans l’ère post-industrielle de l’eLearning. Et tous ensemble, nous cultivons nos envie de voir les participants aux MOOC, COOC et autres SPOC aller loin et affûtons nos talents de pédagogues pour leur donner envie de nous dépasser. Nous travaillons de cette manière avec des entreprises, des établissements culturels, des associations. Nous vous livrerons très bientôt quelques retours d’expérience mais pour le moment, nous profitons encore du plaisir de faire ensemble.

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